Le 15 janvier 2013, Yoann Boyeaux (31 victoires dont 20 par KO, 4 défaites) remportait le championnat de France des poids coqs, contre Karim Guerfi. Une victoire aux points, obtenue de façon convaincante devant un adversaire de valeur. Bref, le tremplin idéal pour prétendre à une chance européenne. Un mois plus tard, alors que le Dijonnais préparait son combat de rentrée, il apprenait que sa victoire était rayée des listes et que la ceinture de champion de France lui était retirée. La faute à un contrôle positif aux corticoïdes. Un rhume mal soigné, selon le boxeur. Six mois de suspension pour la fédération. Deux ans plus tard, on a retrouvé Yoann Boyeaux à Buenos Aires, où son punch fait des ravages. Depuis 18 mois, et le 2 août 2013, date de son premier combat outre-Atlantique, le Français a battu 11 boxeurs locaux. Il a également remporté la ceinture WPC mondiale des coqs et grimpé à la 10e place du classement des super mouches de la WBO. Interview bout du monde.
Qu’est-ce qui t’a décidé à quitter la France ?
Quand la fédération m’a retiré mon titre, j’étais vraiment pas bien. Je passais mes journées à Nice, chez moi, avec ma Playstation. Même si arrêter la boxe n’a jamais été une option, je me voyais mal reprendre en France. Avec mes proches on a cherché un endroit où je pourrais me refaire et progresser. J’ai toujours adoré les boxeurs argentins : Monzon, Reveco, Narvaez, Maidana, Matthysse… Et puis j’ai pris un aller simple pour Buenos Aires.
Comment s’est passée l’arrivée ?
J’avais simplement le numéro de téléphone de Juan Pablo, un matchmaker local. Puis j’ai cherché un club. En me promenant, je suis tombé sur l’Almagro Boxing Club (la plus vieille salle de boxe d’Argentine, NDLR), comme ça, au pif. J’ai passé la tête, ça respirait la boxe et j’ai commencé à m’y entrainer. Au début, ils n’étaient pas très agréables, ils ne me calculaient pas. Je me débrouillais tout seul dans mon coin. Jusqu’au jour où ils m’ont demandé de mettre les gants. Et après quelques sparrings, ils m’avaient adopté. Maintenant ce sont des amis.
Et ton premier combat ?
C’est venu vite, quelques semaines après mon arrivée. Un grand moment. Déjà ce n’était pas l’adversaire que je devais avoir. Il faisait sept kilos de plus que moi. Je l’ai boxé quand même. Pendant trois rounds je me suis dit que je n’arriverais pas à le battre. Sauf que le gars a tout envoyé dès le début du combat et à la troisième reprise, il était mort. J’ai pu mettre la marche avant et son coin a jeté l’éponge. J’ai eu chaud. Le lendemain je suis allé vérifier son palmarès et j’ai découvert qu’il boxait sous deux noms différents. L’un avait 3 défaites en 3 combats, l’autre 6 victoires pour 3 défaites et 1 nul. Ici les palmarès ne veulent rien dire. Ça se trouve je boxe un type alors que c’est son frère.
Tu vois une vraie différence entre les boxeurs français et argentins ?
En France, on boxe beaucoup en touche. C’est pour ça qu’il y a si peu de KO. On cherche à gagner mais sans forcément faire le spectacle. Ici, en Argentine, le public s’éclate. Les combats démarrent à 100 à l’heure, quitte à finir en quelques rounds. Ça cogne, ce sont des puncheurs. Faut être mobile, sans ça ils t’arrachent la tête. Ils sont durs, ils encaissent. Moi j’aime bien avancer mais je sais aussi boxer en contre. Alors quand ils envoient leur droite plongeante à la Maidana, j’avance avec l’uppercut. Ils viennent s’empaler dessus, je m’en fais craquer les doigts.
Et demain, quelles sont tes perspectives ?
Je vais repasser en France, pour voir ma famille et peut-être disputer un ou deux combats chez moi à Dijon et à Toulon. Mais je veux continuer à boxer en Argentine. C’est un public de connaisseurs. En général, ils soutiennent l’autre boxeur mais quand je fais un beau combat, ils m’applaudissent. Et puis, ici, je peux boxer 8 ou 9 fois par an de manière très resserrée et monter dans les classements internationaux. Maintenant, j’attends qu’une bonne opportunité se présente, par exemple avec la WBO, aux Etats-Unis.
Propos recueillis par Nicolas Zeisler à Buenos Aires